L’œil de l’expert S4S #6

Depuis 2017, le Gouvernement français a lancé un grand plan de développement de l’apprentissage, afin de répondre à plusieurs enjeux : lutter contre le chômage des jeunes, mieux adapter la formation aux besoins du marché du travail, et revaloriser les filières professionnelles.

Les efforts, initiés en 2018 par la loi « Avenir professionnel », ont eu des résultats significatifs, avec une forte augmentation du nombre de contrats d’apprentissage, passés d’environ 300 000 en 2017 à plus près de 900 000 en 2024, démontrant un réel engouement des jeunes et des employeurs pour cette voie de formation en alternance qui porte ses fruits : aujourd’hui, près de deux apprentis sur trois sont en emploi six mois après leur formation.

Un cadre financier qui encourage les entreprises et les jeunes à se lancer dans l’apprentissage

De fait, la loi « Avenir professionnel » a mis en place plusieurs incitations financières afin d’encourager la signature de contrats d’apprentissage, telles que l’aide unique, une aide forfaitaire versée aux entreprises de moins de 250 salariés pour chaque contrat d’apprentissage préparant un diplôme de niveau bac ou inférieur. Ce dispositif est de nature pérenne.

Une première incitation complétée d’un dispositif d’exonération de charges sociales attractif, dès lors que les rémunérations des apprentis bénéficient de la réduction générale de cotisations et contributions patronales(anciennement « Réduction Fillon »), réduisant dès lors le coût salarial global.

Dans le même temps, les cotisations salariales bénéficiaient elles aussi de fortes exonérations : les apprentis étaient ainsi exonérés de toutes les cotisations sociales, y compris la CSG et la CRDS, dans la limite de 79% du SMIC. Une exonération rabotée depuis le 1er mars 2025.

De nouveaux seuils d’exonération plus restrictifs depuis mars 2025

En effet, la loi de Financement de la Sécurité sociale (LFSS) de 2025 a modifié le régime des exonérations de charges sociales applicables aux contrats d’apprentissage, avec de nouveaux seuils en vigueur :

  • Réduction du plafond d’exonération des cotisations salariales : Le seuil d’exonération des cotisations salariales est abaissé de 79 % à 50 % du SMIC. Ainsi, seule la part de rémunération inférieure ou égale à 50 % du SMIC bénéficie d’une exonération totale des cotisations salariales légales et conventionnelles. La fraction excédant ce seuil est désormais soumise aux cotisations salariales classiques.
  • Assujettissement partiel à la CSG et CRDS : La rémunération des apprentis est désormais soumise à la CSG (9,2 %) et à la CRDS (0,5 %) pour la part excédant 50 % du SMIC.

Ces changements s’appliquent uniquement aux contrats d’apprentissage conclus à compter du 1er mars 2025. Les contrats signés avant cette date continuent de bénéficier des exonérations selon les modalités antérieures.

Une nouvelle réforme pour flécher et garantir la soutenabilité financière du dispositif

Dans un contexte de tensions budgétaires, le ministère du Travail lance une nouvelle phase de la réforme afin de diminuer les dépenses liées à l’apprentissage, qui ont, en contrepartie du succès du dispositif, largement augmenté ces dernières années. Cette réforme entend donc ajuster les exonérations de cotisations sociales et les primes à l’embauche, tout en maintenant un soutien ciblé pour les secteurs et les niveaux de formation jugés prioritaires.

Ainsi, les entreprises devront désormais contribuer au financement des contrats d’apprentissage préparant un diplôme ou titre à finalité professionnelle de niveau Bac+3 et plus. Une participation obligatoire de 750 euros par contrat est prévue, recouverte par les CFA : elle entrera en vigueur le 1er juillet 2025.

Par ailleurs, les aides à l’embauche d’apprentis sont réduites et modulées en fonction de la taille de l’entreprise :

Entreprises < 250 salariésEntreprises ≥ 250 salariés
Au plus niveau BaccalauréatNiveau Bac +2 à Bac +5Au plus niveau Bac+5
Aide unique, pour les contrats conclus à partir du 25/02/2025 :

– 5 000 € au titre de la 1re année du contrat (contre 6 000 € avant l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions) ;

– 6 000 € au titre de la 1re année du contrat pour les contrats conclus avec un apprenti reconnu travailleur handicapé (montant de l’aide inchangé)
Aide exceptionnelle, pour les contrats conclus du 24/02/2025 au 31/12/2025 :

– 5 000 € au titre de la 1re année du contrat (contre 6 000 € avant l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions) ;

– 6 000 € au titre de la 1re année du contrat pour les contrats conclus avec un apprenti reconnu travailleur handicapé (montant de l’aide inchangé)
Aide exceptionnelle, pour les contrats conclus du 24/02/2025 au 31/12/2025 :

– 2 000 € au titre de la 1re année du contrat (contre 6 000 € avant l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions) ;

– 6 000 € au titre de la 1re année du contrat pour les contrats conclus avec un apprenti reconnu travailleur handicapé (montant de l’aide inchangé)

Resteront néanmoins exonérés de participations obligatoires des employeurs et du plafonnement du niveau de prise en charge les formations sur les premiers niveaux de qualification, considérés comme stratégique. Il est également à noter que l’Etat pourra choisir, selon la réforme, de majorer certaines formations jugées prioritaires afin de garantir un bon niveau d’incitation.