L’œil de l’expert S4S #16
À compter du 1ᵉʳ janvier 2026, les règles du jeu évoluent pour les employeurs avec l’arrivée de la Réduction générale dégressive unique (RGDU). Présentée comme un moyen de rationaliser les allègements de cotisations, cette réforme va modifier en profondeur la manière de calculer les charges patronales, mais aussi la façon de les déclarer. Au-delà des intentions affichées de simplification, il s’agit d’un changement structurel dont les impacts opérationnels se feront sentir dès les premières paies de 2026.
Ce qui disparaît, ce qui arrive
Aujourd’hui encore, les entreprises peuvent appliquer des taux réduits sur certaines cotisations patronales, notamment la cotisation maladie et la cotisation allocations familiales pour les bas niveaux de rémunération. Ce système prend fin au 31 décembre 2025. En clair : plus aucun taux réduit en fonction du salaire, et un retour au taux plein pour tout le monde, soit 13 % pour l’assurance maladie et 5,25 % pour les allocations familiales.
Toutes les réductions existantes sont désormais intégrées dans un dispositif unique, remplaçant à la fois la réduction générale actuelle, les taux réduits d’assurance maladie et d’allocations familiales, ainsi que certaines exonérations spécifiques aux petites entreprises.
LA RGDU s’appliquera jusqu’à 3 Smic. La réduction ne fonctionnera plus par paliers mais via une formule unique, progressive et, sur le papier, plus fluide. On sort donc d’un système à effets de seuils, mais pour entrer dans un modèle davantage basé sur des calculs individualisés et réguliers.
Si l’impact financier global devrait rester relativement stable pour les entreprises employant des salariés autour du Smic, l’automaticité actuelle disparaît. Le calcul du coefficient de réduction dépendra désormais beaucoup plus des éléments variables, des absences, du suivi fin du Smic mensuel reconstitué. Un arrondi oublié, une prime mal assise ou une régularisation tardive pourraient suffire à créer un écart.
Une formule unique et une paie plus technique
La réforme va nécessiter une phase d’adaptation pour les services paie. L’introduction du coefficient unique de la RGDU suppose une mise à jour de nombreux paramétrages, mais aussi de nouvelles habitudes de contrôle. Là où le système actuel laisse encore une part de marge d’erreur en cours d’année, la RGDU reposera sur un calcul continu, avec un impact immédiat sur les cotisations appelées.
Les éditeurs de logiciels devront intégrer non seulement la nouvelle formule mais aussi une gestion renforcée des régularisations, notamment annuelles. Les équipes paie, de leur côté, devront probablement passer par des simulations et tests préalables pour identifier les points sensibles, en particulier dans les environnements multi-sociétés ou multiconventions, où la variabilité des assiettes rend le calcul plus complexe.
La DSN évolue aussi, bien que de façon plus discrète qu’on aurait pu l’imaginer. Concrètement, les CTP liés aux taux réduits maladie et allocations familiales disparaissent, notamment les CTP 637 et 437. À partir de 2026, les codes 635 et 430 deviendront la norme. Si cela peut sembler simplifier la déclaration, la réalité est plus nuancée : la DSN reflètera directement la justesse du paramétrage en amont. Une erreur ne pourra plus être compensée par un simple changement de taux ou de code comme cela peut encore être le cas aujourd’hui.
Une réforme à anticiper
Sur le papier, la réforme va dans le sens d’un dispositif unique plus lisible. Les entreprises devront s’y préparer dès 2025 : mise à jour des paramétrages, tests, contrôle des assiettes, formation des équipes, échanges avec l’éditeur.
Ce qui change, ce n’est pas juste une ligne de taux dans le bulletin : c’est la façon dont la réduction s’intègre dans l’ensemble du mécanisme de calcul des cotisations. La paie devient moins basée sur des règles fixes et plus sur une logique mathématique, évolutive et dépendante des données.
2026 marquera donc un tournant. Non pas parce que la réforme est brutale, mais parce qu’elle rend indispensable une paie précise, cohérente et parfaitement paramétrée. Pour bien anticiper cette transition, les entreprises doivent préparer leurs logiciels, vérifier et ajuster leurs paramétrages, simuler les impacts sur différents profils de salariés, et former les équipes paie aux nouvelles règles de calcul et de DSN. Une anticipation méthodique permettra d’assurer une transition fluide et d’éviter régularisations, erreurs de déclaration ou écarts budgétaires, transformant la RGDU en un levier de fiabilité plutôt qu’une source de contraintes.
Illustration – Comparaison entre l’ancien dispositif et la nouvelle RGDU
Exemple 1 :
Salarié à temps plein, rémunération annuelle de 24 000 euros brute (soit 2 000 euros par mois) – hypothèse d’un SMIC à 11,88 euros et des coefficients RGDU = 0,4013 et RGCP = 0,3233 (société avec un taux FNAL à 0,50%)
Montant RGDU = 7 384,80 €
Montant RGCP = 5 709,60 € ;
Montant réduction taux maladie = 1 440 € ;
Montant réduction taux AF = 432 € ;
Soit anciens dispositifs = 7 581,60 €
Exemple 2 :
Salarié à temps plein, rémunération annuelle de 36 000 euros brute (soit 3 000 euros par mois) – hypothèse d’un SMIC à 11,88 euros et des coefficients RGDU = 0,4013 et RGCP = 0,3233 (société avec un taux FNAL à 0,50%)
Montant RGDU = 3 492 €
Montant RGCP = 0 € ;
Montant réduction taux maladie = 2 160 € ;
Montant réduction taux AF = 648 € ;
Soit anciens dispositifs = 2 808 €

